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Haute-Grosne et son bassin
quatre lits pour une rivière ...

une chronique largement inspirée du texte original "la Haute Grosne" par Martin RAETHER


le bassin versant de la Haute Grosne
bassin de la Grosne

Ce bassin hydrologique versant de Haute Grosne présente une originalité quasi-unique : il écoule ses eaux à contre-sens vers le nord alors qu'on les sait promises à la Mediterranée.

La ligne de partage des eaux serpente du col d’Avenas (743 m) à la montagne de Saint-Cyr (771 m), en passant par la montagne de Rochefort (888 m), le col de Crie (624 m), le mont Saint-Rigaud (1009 m), le col de Champ Juin (726 m), la montagne de Charuge (855 m), la Croix-de-Villemartin (611 m), le village de Saint-Bonnet-des-Bruyères (560 m), la Grande Roche (669 m) et le col de la Croix d’Auterre (556 m).

Pour les pays haut-beaujolais et haut-clunysois qui intéressent notre site, le partage des eaux s’effectue principalement entre deux bassins régionaux, celui du Sornin et de la Grosne, et au-delà entre deux des plus grands fleuves français, la Loire et le Rhône, et bien au-delà encore entre les deux grands bassins continentaux, celui de l’Atlantique et de la Méditerranée.

de la Grosne de mon enfance ... aux "Deux Grosnes"

De la Tonne, un écart éloigné du bourg de Saint-Jacques-des-Arrêts, là ou j'habitais dans les années 50 au sein de la ferme de mon père Jean-Pierre dit Pétrus et de Marcelle ma mère, je ne pouvais apercevoir son lit caché par autant d'arbres et de fourrés, cette Grosne qu'on disait venir d'une source d'Avenas, filait au fond de la vallée vers le nord, pour traverser Ouroux, puis faire limite entre Saint-Mamert et de Saint-Jacques-des-Arrêts, avant d'entrer dans le département de Saône-et- Loire au pont de Tsi'Tozet et traverser la commune de Germolles-sur-Grosne ...

Aux yeux de l'enfant que j'étais alors, "ma" Grosne était unique, ses bords un terrain de jeux où j'adorais respirer les mystères du milieu aquatique : épier les rides des plans d'eau claire retenus par trois ou quatre troncs d'arbre jetés en travers du courant, les bouillonements des petites cascades aux pieds desquelles j'imaginais la truite fario aux flancs pointés de rouge ; espérer l'éclair bleuté supersonique au ras de l'eau du martin-pêcheur ; soulever les galets un à un pour dénicher les petits tubes habillés de grains de sable dans lesquels se cachent les porte-bois pour amorcer la ligne au bout de ma canne de simple noisetier et attraper le vairon ; jeter au-dessus de la rivière à côté du pont de pierre avec ma soeur Paulette et mes cousins Ferdinand et Bernard une passerelle avec de vieux morceaux de bois ...

Ce n'est que plus tard que son nom plus complet de "Grosne Orientale" me fut révélé ; je compris alors qu'on l'avait parée d'un tel adjectif pour la distinguer d'une autre, la "Grosne Occidentale", une soeur descendue du Mont Saint-Rigaud, qui traverse Monsols, Saint-Christophe, Trades, pour entrer en Saône-et-Loire sur le territoire de la commune de Saint-Léger-sous-la-Bussière, les deux rivières venant s'y unir en un seul lit.

Deux rivières de même nom qui convergent en une seule, c'est bien là l'idée du nom de baptême donné en 2019 à la commune déléguée "les Deux Grosnes" née de la fusion de sept communes: "deux vallées, deux cours d'eau rassemblant sept clochers" ...

"Grosne Orientale", "Grosne Occidentale", "Grosne de Saint-Pierre"
"Grosne de Matour oubliée"

Pour résumer d’emblée le propos, on trouve dans le Haut-Beaujolais et le Haut-Clunisois trois "grandes" Grosne, auxquelles on ajoutera une "petite" Grosne un peu oubliée. Ces trois rivières qui portent toutes le nom de "Grosne", prennent leurs origines dans le Haut-Beaujolais, et toutes se rejoignent sur le territoire de la commune de Saint-Léger-sous-la-Bussière, commune du Haut-Clunysois, département de Saône-et-Loire.

La rivière située à l’est est appelée "Grosne orientale" ; parallèlement à celle-ci et un peu plus à l’ouest, coule la "Grosne occidentale". Il s’agit de deux appellations modernes que l’on ne trouve pas avant le XIXe siècle.
C'est ainsi que dans le cadastre napoléonien de Saint-Léger-sous-la-Bussière établi en 1837, la Grosne occidentale d’aujourd’hui était nommée "la Petite Grosne", et l’autre, l’orientale, "la Grosne " ou "la Grande Grosne".

LA GROSNE ORIENTALE
Commençons par la Grosne orientale, qui prend sa source sur la commune d’Avenas, dans le département du Rhône, au dessus du hameau Le Pardon, au lieu-dit "le Petit Callot", à environ 700 m d’altitude, sur le flanc nord de la montagne de Rochefort (888 m), et dont le versant méridional regarde Beaujeu.

Cette Grosne orientale n’a pas de source à proprement parler, elle sourd plutôt dans un creux marécageux, d’où s'écoule un minuscule ruisseau qui, très vite, reçoit de droite et de gauche de nombreux ruisselets : à l'entrée du bourg d’Ouroux, elle reçoit sur sa droite les eaux d'un ruisseau au grand nom de "La Loire", puis sur sa gauche au lieu-dit "le Razay" celles d'un autre ruisseau dénommé "de la Carelle".
Après s'être glissée entre Saint-Mamert, site clunisien, et Saint-Jacques-des-Arrêts, elle accède au département de Saône-et-Loire, passe entre le château de Gorze et le bourg de Germolles, premier en amont d’un grand nombre de villages à porter la spécification "sur-Grosne", et reçoit en aval et sur sa droite à proximité du lieu-dit "le Clairon" les eaux du ruisseau de Tavoisy, avant de faire son entrée sur le territoire de la commune de Saint-Léger-sous-la-Bussière.

LA GROSNE OCCIDENTALE
La Grosne occidentale, quant à elle, prend son origine à Monsols, dans le département du Rhône, sur le versant nord-est du mont Saint-Rigaud qui domine le département du Rhône du haut de ses 1009 m d'altitude.
Là aussi, on ne peut pas parler de "source", mais plutôt d’une zone humide en plein milieu de la commune, à environ 540 m d’altitude. De là d’autres ruisseaux viennent s'y déverser : parmi ceux-ci celui d’Aroy, celui du Saut et celui des Planches.
Puis son cours chemine sous le regard du bourg Saint-Christophe, d’où l’on peut jouir, depuis l’église de Vervy et de son aire de pique-nique, d’une vue sur toute la vallée jusqu’au mont Saint-Rigaud.
Cette Grosne traverse ensuite le petit lac de rétention de Trades, où est édifié un moulin devenu aujourd'hui restaurant de campagne.
Enfin elle entre dans le département de Saône-et-Loire, sur le territoire de la commune de Saint-Léger-sous-la-Bussière, et à un kilomètre seulement rejoint la Grosne orientale, à une centaine de mètres en amont du lieu-dit "Pontcharras".

C’est à partir de cette jonction "orientale-occidentale" que l'Institut Géographique National (IGN) a opté de donner à ce cours d'eau ce nom: "les Deux Grosnes".

LA GROSNE DE SAINT-PIERRE
La troisième Grosne, appelée sur les cartes IGN "la Grosne" ou "la Grosne de Saint-Pierre", prend sa source dans le département du Rhône sur le territoire de la commune de Saint-Bonnet-des-Bruyères, près du lieu-dit "Chameraud" (582 m), entre en Saône-et-Loire pour traverser Saint-Pierre-le-Vieux et son bourg ; elle y reçoit les eaux du ruisseau "le Pelot", et rejoint "les Deux Grosnes" sur le territoire de la commune de Saint-Léger-sousla-Bussière, en aval du château de la Papeterie ou de la Féculerie, construit en 1870 par Jules Plassard (1833-1909), gérant du grand magasin parisien Le Bon Marché, administrateur de biens et exécuteur testamentaire de Marguerite Boucicaut, maire et bienfaiteur du village, et ami d’Alphonse de Lamartine.

A la recherche de sa source, Martin RAETHER écrit à son sujet:

Pour en savoir un peu plus sur cette troisième Grosne, j’ai remonté son cours, quittant encore une fois notre département et allant aussi loin que la route pouvait m’emmener. Là, un jeune agriculteur m’a d’abord confirmé que le ruisseau d’environ 50 cm de largeur en bas dans la vallée, au pont de Chameraud, s’appelait bel et bien la Grosne.
À ma question s’il pouvait m’en indiquer la source, il m’a bien gentiment, mais avec un petit sourire, répondu, en pointant dans trois directions différentes : « C’est là,… et là,… et là. »
C’était déjà, en petit, le «cirque majestueux» que Raymond Oursel avait observé pour l’ensemble du haut bassin versant de la Grosne. La minuscule rigolette que j’ai suivie en amont descendait en pente raide de la montagne de Charuge (855 m). Tous les quelques mètres coulaient d’autres ruisselets qui arrivaient de tous côtés. La montagne semblait suinter de toute part. Enfin, vers 600 mètres d’altitude – le dernier sentier était depuis longtemps derrière moi –, confronté à une sorte de dense jungle marécageuse, grimpant péniblement entre d’immenses fougères et des troncs d’arbres entrecroisés pêle-mêle et essayant d’éviter de multiples ruissellements, j’ai décidé de rebrousser chemin. Et bien, tant pis pour l’Humanité qui ne saura donc pas où localiser exactement la source recherchée ! Quant au lecteur, il est humblement prié de me le pardonner : il aura compris qu’en vérité la Grosne n’a pas trois sources, mais ... trois cents.


Jusque là on aura dénombré trois rivières : 1) la Grosne d'Ouroux, 2) celle de Monsols et 3) celle de Saint-Pierre-le-Vieux. Et comme il a été dit, ces trois rivières unissent leurs cours à Saint-Léger-sous-la-Bussière, à 313 m d’altitude.

UNE QUATRIEME GROSNE OUBLIEE : CELLE DE MATOUR
Cette autre Grosne rassemble trois ruisseaux : au nord le ruisseau de Trécourt, au sud et venant des flancs de la Grande Roche (669 m) le ruisseau du Petit Moulin, et à l’ouest le ruisseau de la Baize qui prend son origine en amont du hameau Crozet, juste en dessous du col de la Croix d’Auterre (556 m).
Elle serpente à proximité du bourg de matour, en-dessous de celui de Trambly, baigne ensuite un lieu-dit portant le joli nom de "Pari-Gagné" hameau dont le nom évoque un pari qui aurait été fait (et gagné) sur le délai qui serait mis à construire une ou deux maisons sur ce site.
Puis quelques kilomètres plus en aval, sur la commune de Trambly au moulin du lieu-dit "Montravant", elle rejoint les trois Grosnes réunies que nous avons précédemment décrites.
Les habitants des communes de Matour et de Trambly ont de bonnes raisons de considèrer que leur vallée est également arrosée par une "Grosne" puisqu'en 1835 le cadastres de Matour nomme leur cours d'eau "la Grosne", et que celui de Trambly établi un an plus tôt fait se jeter cette même "Grosne" dans "la Grosne Rivière" au lieu-dit "Montravant" ...
Mais dès lors que les cartes récentes ont baptisé cette rivière "ruisseau de la Baize" sur l'ensemble de son parcours, pour notre part nous la qualifierons de "Grosne Oubliée" car issue du passé ...

et au-delà coule une seule Grosne ...

Ces multiples Grosnes ci-avant décrites ont ainsi accouché au lieu-dit "Montravant" d'un unique et plus important cours d'eau, lequel va désormais porter le nom de "Grosne" et poursuivre sa route en direction du Nord et de la ville médiévale de Cluny, en amont de laquelle elle reçoit le Raverot à la hauteur de Montagny-sur-Grosne, la Noue à la hauteur de Clermain, et le Vallouzin à hauteur de Sainte-Cécile.
Ce dernier ruisseau du Vallouzin prend sa source près de Tramayes, traverse la communes de Saint-Point et son lac de rétention, puis la commune de Bourgvilain, et rejoint la Grosne sur le territoire de la commune de Sainte-Cécile.

Enfin, de Cluny jusqu'à sa confluence avec la Saône la rivière coule dans une basse plaine alluviale qu'elle envahit fréquemment de ses eaux lors des précipitations abondantes d'automne et de printemps. La régulation du cours de la rivière s'effectue par des biefs de retenues aménagés au cours des siècles pour l'alimentation des nombreux moulins qui jalonnent la vallée. Ceux-ci n'ont plus aucune activité de meunerie mais demeurent les seuls ouvrages qui permettent d'amortir, faiblement, l'intensité des crues.
Au final, avant de fusionner ses eaux dans celles de la Saône à une dizaine de kilomètres au sud de Chalon-sur-Saône, entre Marnay et Ouroux-sur-Saône (174m), la Grosne aura parcouru environ 97 kms et traversé 32 communes.

POUR COMPLETER: UNE CINQUIEME PETITE GROSNE !
Il existe aussi une rivière appelée "Petite Grosne" dans le Mâconnais, celle qui sourd, comme ses consœurs, dans le Haut-Beaujolais, mais sur le territoire de la commune de Cenves, département du Rhône, passe par Serrières et Pierreclos, contourne la Roche de Vergisson pour enfin venir elle aussi se jeter dans la Saône.